L’anaphore est usée, toute fraîche est l’épiphore !

Mai 27th, 2014 | Par | Catégorie ° style & ton

écriture design

En 2012, le candidat Hollande avait assommé son rival à coups d’anaphores.
Moi président, … répété seize fois en début de phrases.

Deux ans plus tard, l’anaphore a pris un coup de vieux. La figure de style s’est usée. Encore à cause de Hollande, a dit quelqu’un dans la salle.
L’utiliser maintenant ferait au moins sourire. Elle insinuerait que celui qui parle ou écrit raconte des salades.

Si l’anaphore a donc perdu de sa force, il nous reste encore l’épiphore pour marteler nos quatre vérités.

L’épiphore est une figure de style fondée sur la répétition d’un mot ou d’un groupe de mots à la fin de propositions, de phrases ou de vers se succédant.

Et toujours ce parfum de foin coupé qui venait de Bérénice qui résumait Bérénice, qui le pénétrait de Bérénice.
(Louis Aragon)

L’épiphore est fréquente en écriture littéraire.
En bon tribun, Mitterrand l’a utilisée dans son discours dit de Cancun :

Salut aux humiliés, aux émigrés, aux exilés sur leur propre terre qui veulent vivre et vivre libres.
Salut à celles et à ceux qu’on baillonne, qu’on persécute ou qu’on torture, qui veulent vivre et vivre libres.
Salut aux séquestrés, aux disparus et aux assassinés qui voulaient seulement vivre et vivre libres.
Salut aux prêtres brutalisés, aux syndicalistes emprisonnés, aux chômeurs qui vendent leur sang pour survivre, aux indiens pourchassés dans leur forêt, aux travailleurs sans droit, aux paysans sans terre, aux résistants sans arme qui veulent vivre et vivre libres. »

L’épiphore peut aussi être utilisée en écriture utilitaire pour donner de la force à ses propos. Cette figure de style renforce le propos. La symétrie le structure. Efficace. A l’oral et à l’écrit.

Supprimer les adverbes, limiter le nombre d’adjectifs, c’est écrire design.
Composer de courtes phrases, réduire les subordonnées, c’est écrire design.
Contrôler son émotion, être sûr de soi, c’est écrire design.

Ecrire design, c’est être clair, concis, élégant.

Notez que ce dernier exemple se conclut par une anadiplose : la phrase débute par un un ou plusieurs mots – Ecrire design – présents  à la fin de la phrase précédente.
Comme dans Il est ennuyeux. Ennuyeux il restera.

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photo : © eb

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2 commentaires to “L’anaphore est usée, toute fraîche est l’épiphore !”

  1. Marc dit :

    Je ne pense pas que les jeunes d’aujourd’hui trouvent que les anaphores et épiphores soient amusants. Il est fort probable qu’ils trouvent ça ennuyeux. Mais je pense que c’est ce qui fait la beauté de la langue française. Il est assez fréquent de les voir dans les livres anciens ou les livres écrits par de grands intellectuels, mais pas dans le langage courant.

    • boileau dit :

      Merci de votre commentaire.
      Est-il question de trouver cela amusant ou non ? Boursicoter l’est-il? 😉
      Mais efficace pour frapper son lecteur cela l’est.
      Bon mois d’août.

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