L’accord du participe passé des verbes pronominaux
Mai 21st, 2012 | Par boileau | Catégorie * grammaireIls se sont téléphoné, ils se sont enfin parlé. Puis, ils se sont rencontrés.
Se voir, se plaire, s‘écrire, se battre… sont des verbes pronominaux. Leur participe passé est conjugué avec l’auxiliaire être. Pourtant l’accord ne se fait pas toujours avec le sujet.
Ah ! le participe passé des verbes pronominaux ! Accord ou pas accord ?
Voici la règle simple que j’utilise pour m’y retrouver.
Vous n’avez que 2 minutes ? Donnez-m’en 4. Pour graver dans votre esprit, par des exercices, la règle toute simple. Vous serez ainsi sûr de vous.
Rappelez-vous la règle de base de l’accord des participes passés
1. Il a acheté des obligations russes. Il a réalisé une excellente affaire. Il en est content.
Il est content des obligations russes qu’il a achetées et de l’excellente affaire qu’il a réalisée.
Le participe passé des verbes avec auxiliaire avoir s’accorde avec le complément d’objet direct (COD) si, et seulement si, celui-ci précède le verbe.
ici : obligations russes, excellente affaire sont COD.
2. Elle est tombée en courant sur le pont et, donc, ils sont arrivés les derniers.
Le participe passé des verbes avec auxiliaire être s’accorde avec le sujet du verbe.
Une règle simple et pratique pour le participe passé des pronominaux
Cas A. Si le verbe est seulement utilisable sous forme pronominale – se suicider, se soucier…
- alors, vous accordez le participe passé avec le sujet, comme un participe passé avec être.
Cas B. Si le verbe existe aussi sous forme non pronominale – (se) laver, (se) voir….
- alors transformez la phrase afin que le participe passé du verbe pronominal soit conjugué avec avoir.
- Ensuite, appliquez la règle de l’accord des participes passés avec avoir.
Cours particulier boileau : les 7 règles d’or du mieux écrire
Voici des séries d’exemples en application de cette règle.
Cas A : Ils se sont souvenus avec émotion
Ils se sont obstinés à rester dignes. Elle s’est souvenue des bons moments. Elle ne s’est pas lamentée de la situation.
Les verbes pronominaux utilisés ici sont des pronominaux purs : ils ne sont utilisés que sous forme pronominale.
ex.: s’obstiner (obstiner ne s’utilise pas), s’enfuir (enfuir ne s’utilise pas), se suicider, se soucier de, se souvenir, se pâmer, se rebeller, se lamenter, s’extasier,…
A noter que les quelques verbes dont la forme pronominale possède un sens tout autre que la forme non pronominale sont aussi considérés comme purs.
ex. s’apercevoir : J’ai aperçu les canots de sauvetage <> Je me suis aperçu de mon erreur
Les pronominaux purs s’accordent avec le sujet, comme tout participe passé conjugué avec être.
Vu le prix du billet, elle s’est abstenue de toute remarque.
Quand ils se sont aperçus de la tragédie en cours, ils se sont enfuis par la coursive arrière.
Les séries suivantes utilisent des verbes pronominaux dont il existe une forme non pronominale (Cas B).
La règle énoncée plus haut y est appliquée et expliquée.
Série 1 : Marie s’est baignée
– Avant de monter dîner, elle s’est douchée et s’est maquillée.
Transformons la phrase en la conjuguant avec avoir : Elle a douché soi ( sa propre personne). Elle a maquillé soi (sa propre personne)
Soi (sa propre personne) a valeur de complément d’objet direct (COD).
Dans la construction pronominale, ce COD est indiqué par se. Se, pronom réfléchi, désigne elle, féminin singulier.
Se COD précède le verbe pronominal. Le participe passé s’accorde donc en genre et nombre.
– Elle s’est félicitée de cette idée de voyage.
Elle a félicité soi ( sa propre personne).
Soi (sa propre personne) a valeur de complément d’objet direct (COD).
Dans se féliciter, se a valeur de COD. Il précède le verbe. Le participe passé s’accorde donc : féminin singulier.
– Elle s’était lourdement trompée.
Elle avait trompé soi (sa propre personne ).
Dans se tromper, se a donc valeur de COD, précédant le verbe.
Le participe passé s’accorde au féminin singulier.
Sachez, si cela vous chante, que se tromper, se laver, se doucher, se féliciter, se lever… sont des verbes pronominaux réfléchi direct.
Série 2 : Elle s’est offert une nouvelle coupe
– Elle s’est accordé une petite fantaisie.
Transformons la phrase en la conjuguant avec avoir : Elle a accordé à soi ( à sa propre personne) une petite fantaisie.
– Elle s’est procuré une petite dose. Elle a procuré à soi ( à sa propre personne) une petite dose.
Dans se procurer, se donner, s’offrir… se a valeur de complément d’objet indirect (COI) (à soi, à sa propre personne). Il n’est pas COD. Le participe passé reste donc invariable
Sachez, si cela vous chante, que se donner, s’accorder, se procurer… sont des verbes pronominaux réfléchi indirect.
Série 3 : Elle s’est maquillée. Elle s’est maquillé les yeux
Elle s’était déjà lavée.
Puis elle s’est encore lavé les mains.
Rien de neuf ! La logique est respectée : Elle a lavé soi (sa personne) : le se a valeur de COD. Il y a donc accord.
Puis, elle a encore lavé les mains à elle : le se a valeur de COI. Le COD est les mains. Ce COD suit le verbe : pas d’accord.
Il convient d’écrire :
– Les mains qu’elle s’est lavées…
L’accord se fait avec le COD les mains qui, ici, précède le verbe. Tout reste cohérent.
Tout comme ici :
– Mes mains, je me les suis lavées…
– Les yeux qu’elle s’est maquillés…
– Les douceurs qu’elle s’est offertes…
Série 4 : Ils se sont vus, ils se sont plu.
Toujours la même transformation avec avoir et la même logique d’accord :
– Des passagers se sont battus pour accéder au pont supérieur.
– Des jeunes femmes se sont griffées sauvagement. Elles se sont reproché leur couardise.
– Eux, dans la file, ils se sont parlé et se sont raconté leur vie qui commençait.
a. Se battre, se griffer : ils ont battu, griffé l’un l’autre, les uns les autres, eux-mêmes
S’aimer, s’embrasser, se voir : l’un l’autre.
Le se a valeur de COD : le participe passé s’accorde.
b. Se parler, se raconter, se reprocher, s’échanger… : Ils ont parlé, raconté, reproché l’un à l’autre, à eux-mêmes
Se téléphoner, se plaire… : l’un à l’autre, à eux-mêmes .
Le se a valeur de COI. Pas d’accord.
Sachez, si cela vous chante, que se battre, s’aimer, se parler… sont des verbes pronominaux réciproque direct ou indirect.
On résume le participe passé des verbes pronominaux
* Si le verbe est uniquement utilisable sous sa forme pronominale – se suicider, se soucier…
– alors, accorder le participe passé avec le sujet* Si le verbe est aussi utilisable sous forme non pronominale – (se) laver, (se) voir….
1. alors transformer la phrase afin que le participe passé soit conjugué avec avoir.
2. Ensuite, appliquer la règle de l’accord des participes passés avec avoir.
Trois exceptions, pour les puristes : s’arroger, se rire, se complaire restent invariables. On oublie : Elle s’est arrogé la plus luxueuse des cabines.
Il reste à voir les verbes pronominaux suivis d’un infinitif. Rassurez-vous : la cohérence reste d’application.
Voyez cet article : Elle s’est sentie défaillir quand elle s’est senti emporter par cet inconnu
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Photo 2 : Bain News Service, publisher .J.H. McFadden and wife [between ca. 1910 and ca. 1915] LOC
J’ai tout compris! Et Dieu (ou Diable!) sait si tout ce que j’ai pu lire jusqu’ici sur cette épineuse question des verbes pronominaux m’a toujours embrouillée plutôt qu’éclairée. Merci donc à Boileau et à toi Etienne de tes règles limpides. Restent à me les approprier dans la pratique et à les transmettre à d’autres.
Et je suis prête à lire aussi dans un avenir pas trop lointain tes propositions sur les pronominaux suivis d’un infinitif.
Merci et ouf, car c’est toi qui m’en as donné l’idée. Content de te lire ici.
Je me charge des pronominaux suivis d’un infinitif.
Aaah cet accord pronominable 🙂 Que de discussions avec un de mes clients sur la phrase suivante ‘nous nous sommes fixé un défi”. Phil, faut pas un ‘s’ à ‘fixé’ ? T’es sûr ? J’ai demandé et on m’a dit qu’il en fallait un… Tu peux revérif!er, dis ? Donc > merci Boileau !
Moi je ne mettrais pas de “s”, c’est le défi qui est fixé et non “nous”. Voila la phrase transformée avec l’auxiliaire être: Nous avons fixé un défi à nous.
Pardon avec l’auxiliaire avoir
C’est clair, concis et bien illustré par des exemples. Et très bien écrit aussi. Merci!
Merci pour votre attention. A lire l’article. Et à m’encourager ainsi.
Oh mon dieu que c’est difficile…!!! Si déjà pour un français, l’accord du participe passé est tout à fait embrouillant…. imaginez pour quelqu’un qui n’a pas le français comme langue maternelle…!!!! Moi, je suis espagnole et ça devient tout un “casse-tête”!!!! Pourtant et après avoir lu les explications… je crois avoir compris…. (…je “crois”…jajaja). Merciiii Boileau!!!
Juste une chose… On pourrait s’aider, avec les accords des verbes pronomimaux (bien sûr, en plus de tout ce que tu as si bien expliqué…) en pensant si le verbe peut être suivi de la préposition “à” ou pas pour faire l’accord?
Par exemple… les verbes “téléphoner” “parler” etc… sont suivis de la préposition “à” donc même si j’utilise la règle génerale des accords pour les verbes pronominaux où il faut employer le verbe être comme auxiliaire et par conséquent faire l’accord…. il n’y aurait pas d’accord…. C’est à dire: quelque verbe qui soit ou qui puisse être suivi de la préposition “à” même sous le forme pronominale …… pas d’accord avec le sujet.
c’est ça?
Merci en avance
Téléphoner, parler… n’ont jamais de COD. On ne téléphone pas quelque chose ou quelqu’un. On parle ou téléphone à quelqu’un.
Donc c’est juste, votre astuce – si je la comprends bien – fonctionne. Jamais d’accord.
Attention On peut offrir quelque chose à quelqu’un.
Merciiiiii boileau de me répondre si vite….!!!!! Et merci encore pour toutes tes superbes explications. Et si d’ailleur mon astuce “fonctionne”…. TANT MIEUX!!!
Merci pour cet article! Les autres articles du web m’embrouillaient plus qu’autre chose, celui-là est très clair ! 🙂
Merci à vous. C’est encourageant ! 🙂
Merci pour cette excellente explication! 🙂
Merci!!. Sympa de le dire !
Merci pour vos explications. Il faut vraiment se poser pour éviter l’erreur. Mais parfois je doute encore, comme dans la phrase suivante : “je me suis aidé (e) d’Internet”.
J’ai fait appel à Internet 😉
S’aider c’est un peu bizarre non ? Aidée en tout cas dans votre exemple.
Merci pour votre mot gentil.
Merci pour la réponse rapide.
Vous avez raison c’est bizarre, Je choisirai votre phrase !
Bonjour,
Juste pour signaler ce qui me semble être une petite erreur (sans doute d’inattention) dans ce très bon article :
“Se battre, se griffer : ils ont battu, griffé l’un l’autre, les uns les autres, eux-mêmes
S’aimer, s’embrasser, se voir, se plaire : l’un l’autre.
Le se a valeur de COD : le participe passé s’accorde.”
–> Il me semble que “se plaire” serait plus à sa place dans la seconde catégorie (les verbes pronominaux réciproques indirects –> on plaît À quelqu’un donc je dirais plutôt “ils ont plu l’un à l’autre”, comme pour “se parler”). D’ailleurs, le titre de cette partie semble le confirmer puisque vous n’avez pas fait l’accord : “Série 4 : Ils se sont vus, ils se sont plu.”
Merci à vous, Yu.
La coquille est corrigée. Bien vu !
Les passagers se sont battus pour accéder au pont. D’accord pour l’accord.
Mais, par exemple: pendant la guerre, nos soldats se sont bien battu. “se” n’est plus cod. Faut-il accorder ?
Bonjour,
Je ferais l’accord.
Girodet dans son Piège… indique sous Participe passé employé dans la conjugaison d’un verbe pronominal à sens réciproque :
Le pronom personnel réfléchi a valeur de complément direct: Le participe s’accorde alors en genre et en nombre avec le sujet.
Girodet donne alors comme exemple : Ils se sont battus.
Vous me direz que le sens réciproque est faible ici. Girodet, dans son examen, n’envisage pas ce cas.
merci pour ces explications et ces exemples, c’est très clair !
Merci. Sympa de me l’avoir dit.