Ecrire design, c’est être sûr de soi
Oct 14th, 2013 | Par boileau | Catégorie Réédition, Sélection de billets, ° style & tonPanique à bord du charter
Un charter. Tous serrés comme des sardines, mais c’est moins cher. Bientôt de retour au pays. Bien sûr, il pleut. Il tonne même.
L’avion est en phase d’approche. Mon Dieu ! que cela tangue. Silence dans la carlingue. Deux bambins – mais qu’ils les fassent taire ! – braillent. La prochaine fois – s’il y a une prochaine fois -, vous rentrez en autocar.
Clac ! dans le haut-parleur. La voix du commandant de bord. Imaginez qu’il annonce ceci : Ici votre commandant de bord. Nous approchons de B*. Dans 5 minutes, nous allons essayer d’atterrir.
On n’entendrait plus les cris des bambins. Couverts par les gémissements et hurlements des passagers. La panique.
Une règle : Un commandant de bord n’essaye pas. Il agit. Il décide. Il pilote. Et il atterrit.
Essayer ? Non !
Texto
Voici tel quel le mail expédié par le directeur des ressources humaines d’une société comptant plusieurs milliers de travailleurs. Il est francophone.
J’ai essayé de vous joindre mais vous aviez fini journée. J’essaierai de vous contacter de chez moi vendredi car je serai en incapacité demain et après.
Je voulais seulement vous informer que je n’ai pas perdu de vue notre conversation et que j’ai essayé d’avancer dans ma réflexion.
Le verbe essayer est ici répété trois fois. C’est une triple erreur : le commandant de bord d’un service, d’une société ou d’une institution, lui non plus, n’essaye pas. Il agit. Il décide.
Un commandant de bord est aux commandes. En incapacité ? Non ! Il peut être absent un moment, car appelé à d’autres tâches.
La dernière phrase, avec la tournure négative je n’ai pas perdu de vue, ponctue cette impression de manque de contrôle.
Et puis, ce mais vous aviez fini journée (sic). Qu’en sait-il ? De quoi se mêle-t-il là ? Une pointe de reproche ?
Image rayée
Bref, trop de tentatives, pas assez d’affirmations.
Comment suivre un leader erratique ? L’auteur de ces quatre lignes abîme son image. Il raye l’image de l’entreprise dont il dirige un service.
Ecrire, c’est aussi tracer son portrait. Les mots utilisés disent qui nous sommes. Comme le disent nos vêtements, nos gestes.
Sûr de soi : c’est ce que les mots doivent dire de leur auteur. Car On ne croit qu’en ceux qui croient en eux (Talleyrand).
Sans suffisance ni vanité
Après réflexion, le directeur écrirait, par exemple, ceci :
Je vous ai appelé sans succès.
Je vous téléphonerai vendredi, étant occupé entre-temps.
Je garde en tête notre conversation. Ma réflexion mûrit.
– Oui, mais ce directeur est peut-être épuisé ou malade !
Possible. Mais, alors, raison de plus de se relire, de se faire relire ou de laisser mûrir son message.
Bref
Quand j’écris, mon vocabulaire et la tournure de mes phrases montrent que je suis sûr de moi. Sans suffisance ni vanité.
Cours particulier boileau : les 7 règles d’or du mieux écrire
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Texte de juillet 2012 révisé en octobre 2013
Sculpture © Ossip Zadkine
photo : © eb, Musée Zadkine à Paris
Et le même homme a le pouvoir de décider si un candidat est compétent ou pas…
Pourquoi un homme ?
Bonjour Magalo qui, elle, voit le soleil…
Mouais…
C’est surtout pas français Essayer c’est soumettre une chose à l’épreuve avant de l’adopter.
C’est tenter qu’il faut dire, si le projet présente une incertitude. Sinon, l’indicatif du verbe de l’action, et le compte est bon.
Mauis ce qui me heurte le plus, et Boileau n’en pipe mot, c’est le “informer que”. On “informe de ce que” , pas que…
Petit Larousse 1918 : essayer de = tenter, faire un effort pour voir si l’on pourra.
Aurions-nous perdu la mémoire ? La langue de tous les jours est rarement monosémique. J-C.
Gilles est de retour ! Bonjour Gilles.
Essayer est ici correct, d’un point de vue lexical. Vérification faite.
“informer de ce que” et non “informer que” ? Le Trésor de la langue française, LA référence, mentionne la tournure “informer que”. Dont acte.
Tant qu’on y est : il manque l’article dans “fini journée”.
Mon propos dans cet article est le manque de fermeté ( J’entends parfois le mot “assertivité” mais pas trace dans les dictionnaires à disposition).
T’embrasse
Je n’avais pas vu votre commentaire (mea culpa), mais je ne résiste pas à l’envie de vous citer mon Larousse du XXe siècle (1933/1954) : Gramm. – Quand le verbe ‘informer’ a pour complément une proposition, beaucoup de gens hésitent entre ‘que’ et ‘de ce que’. La première tournure est la seule recommandable : « Ils prennent soin que toute la ville soit informée qu’ils font ces emplettes. » (La Bruyère). JC
Entendu le 20 octobre 2013 dans la cabine d’un Airbus 380 venant du commandant de bord : “Nous allons décoller, poil au nez”. Le même nous avait accueilli lors de l’accès à bord en faisant aux plus jeunes d’entre nous des tours de carte brefs, émaillés d’humour. S’ensuivirent nombre d’autres communications très conviviales du même tonneau au cours du voyage. J’atteste savoir détecter les individus sous emprise alcoolique ou d’autres substances. Ce n’était pas le cas. Il semblait juste pimenter les interstices de son activité de pointe enfantines de bonheur.
Interrogeant l’ hôtesse (il en reste sur Air France) sur la relation entre le style du boss et le climat social dans la machine aérienne, j’ai eu confirmation de ses effets bénéfiques.
C’est donc vrai : la forme a une certaine influence sur la nature du management.
A vous relire
la machine aérienne 🙂 Merci à vous.
Il s’agit là d’une technique commerciale. L’humour et la légèreté pour marquer son attention envers le client. Cela n’empêche pas le professionnalisme.
Voir le blog Le sens du client : http://sensduclient.blogspot.be/2013/11/le-service-client-sculpte-votre-image.html
J’ai entendu un enregistrement à la sauvette des commentaires d’une hôtesse à l’atterrissage. Incroyable…
L’avion – enfin les passagers – plié en deux.